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La perception des choses est importante, et la conscience que l'on a de l'importance du français et de l'anglais est trop décalée de la réalité pour que la situation change. Par cet article un poil subjectif , j'essaie de corriger quelques idées reçues tout en m'amusant, pour faire avancer une prise de conscience.
Bonne lecture...

 

L'anglais comme un virus très contagieux ?

 
Haro sur le tout-anglais...!! Taïo! Je viens de repasser sur le site (très intéressant par ailleurs) de l'université de Laval sur les langues (http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/francophonie/francophonieacc.htm) et j'ai noté quelque chose qui me chiffonne mais que l'on retrouve également souvent ailleurs.
Il y a cet espèce d'idée qui est aussi présente chez beaucoup en France que l'anglais est toujours là, conquérant, en pleine expansion. Je voulais regarder la situation de la Nouvelle Zélande puis de la Nouvelle Calédonie sur le site dont je parle. L'auteur se sent obligé de mettre un mot sur la présence de l'anglais, indéniable, car l'Australie et beaucoup de petites ïles anglophones se trouvent plus près de la Nouvelle Calédonie que la métropole. Cela donne l'impression que les langues se répandent surtout de façon visuelle, avec des pays colorés sur une carte, tous en rose pour l'anglais, avec un petit bout de bleu au milieu de tout ça pour le français. Déformation de géographe qui contemple trop de cartes, sans doute! Si l'on s'attache aux personnes dans leur quotidien, ces personnes qui parlent français et apprennent l'anglais de la même façon que nous, à l'école, avec les mêmes profs d'anglais (ils sortent de l'IUFM... lol), on ne voit pas bien en quoi l'auteur doit faire une mention spéciale pour l'anglais dans son article sur les langues de Nouvelle-Calédonie. De la même façon, l'anglais se répand en Inde, par rejet de l'Hindi par ceux qui ne le parlent pas. De la façon dont c'est présenté, on a l'impression que l'anglais se propage comme un virus de grippe H1N1. Effectivement d'ailleurs : on a l'impression qu'il est partout mais finalement on n'en parle plus qu'autre chose. Souvent aussi, on peut trouver des petites remarques en Afrique sur le recul du français, sur sa situation précaire, de même au Québec ou au Canada.
La vie quotidienne évolue moins vite que les idées et on n'apprend pas les langues aussi vite qu'on le déclare sur un formulaire. L'impression de prédominance de l'anglais est à mon avis renforcée par la présence assez forte de sa culture : séries télévisées, musique. Pour la littérature, c'est moins flagrant car on trouve facilement des romans venant d'un peu partout, même de petits pays comme l'Estonie par exemple (par contre, vous pouvez chercher une série télévisée estonienne en France...). Il est certain que réaliser une série télévisée revient à beaucoup plus cher que de publier un livre. Les américains ont déjà amorti leurs studios hollywoodiens, j'imagine, ils ont accumulé un savoir faire indéniable. On peut voir également des publicités, les "made in" sur les boîtes de conserve, etc... ce qui sous-entend que vendre à l'international implique d'utiliser une langue que tout le monde comprendrait, l'anglais.

Ce qui m'agace d'autant plus avec ces remarques, c'est que pour le coup on aurait presque l'impression de trahir sa langue et son pays en lisant des livres anglais ou en écoutant de la musique en anglais. Arrêtons la mauvaise consicence. Prennons ce qu'il y a de bon là où c'est, ce n'est pas parce que l'on se ferme sur le monde anglo-saxon que l'on renforce le poids de notre langue. L'impression d'omniprésence de l'anglais n'est pas tant dûe au nombre de locuteurs qui le parlent qu'à son omniprésence dans notre vie quotidienne.

 

L'anglais indispensable dans la vie professionnelle ?


Pour continuer sur l'impression de prédominance de l'anglais : encore une autre idée répandue, c'est que l'on ne peut pas réussir sans connaître l'anglais. Or, qui l'utilise dans sa vie de tous les jours ou dans son travail ? J'avais parlé avec un chef dans la logistique qui ne n'avait pas de contact avec des anglais, qui n'utilisait jamais l'anglais et me disait qu'il aurait dû l'apprendre, que "c'est indispensable" avec un discours un peu comme : "à l'heure actuelle, on ne peut plus réussir sans l'anglais". Apparement, il en aurait eu besoin pour une promotion vers un autre site de logistique. Si celui-ci traite avec l'Angleterre, cela paraît normal, mais sinon l'anglais n'est pas plus utile que l'allemand ou l'italien si l'on doit traiter avec les pays respectifs. 

Quand on me dit : il faut apprendre l'anglais, je réponds : "pour quoi faire ?" Alors on peut me répondre pour le travail, pour s'ouvrir, parce que tout le monde le parle, pour ceci ou cela, mais concrètement, dans la vie de tous les jours ? Sinon, l'arguement est aussi valable pour d'autres langues comme l'allemand, l'italien, le hindi ou le chinois. Cela se saurait. La langue la plus parlée : le mandarin. Ce n'est pas pour ça que tout le monde doit l'apprendre en France. Seuls ceux qui ont besoin de commercer avec la Chine en ont besoin. Le travail ? Plein de postes non-pourvus parce qu'il n'y a pas assez de personnes qualifiées qui parlent l'allemand, ou des langues de l'Est qui ont moins la côte : polonais, roumain, russe par exemple. Tout le monde parle anglais ? Où ça ? Ici ? Si je vais vivre en Angleterre, je vais apprendre l'anglais. Sinon, l'intérêt est limité. Si ce n'était qu'une histoire de prédominance culturelle, le japonais et sa culture auraient aussi leur mot à dire. Quand je vois le rayon manga à côté des BD, il n'y en a pas autant mais quand même ! Sans compter tous les dessins animés de notre enfance, les japo-niaiseries comme on les appelait. Et les pokemon et autres machins à la dragon ball Z ? Seulement, les japonais ont perdu la seconde guerre mondiale et sont des "nains politiques", selon l'expression consacrée, et leur langue est très éloignée de la nôtre, ce qui ne facilite pas l'expansion de son apprentissage en Europe.

Reste la lecture de revues scientifiques anglaises, qui est pour moi un argument recevable si l'on est scientifique (même si c'est la conséquence de rapports de force, voir l'article cité plus bas) ou pour certains ingénieurs qui veulent avoir accès à de la doc en anglais (ou en allemand, italien...), mais ça ne justifie peut-être pas que tout un pays doive apprendre l'anglais quand même. L'importance de l'anglais est grande dans sa fonction institutionnelle : présent à l'ONU, aux JO et dans de nombreuses autres institutions (mais le français aussi d'ailleurs). Il est également la langue officielle (mais pas forcément des populations) de nombreux pays. Mais moi, je crois surtout que c'est la perception de celui qui est le plus fort, qui a les plus grosses Corones, qui influence la politique linguistique et la perception de l'omniprésence de l'anglais. Mon père, (d'autres personnes aussi) qui n'est pas le dernier des idiots, a dit plusieurs fois que si ça continue, si la Chine continue à se développer, "il" faudra apprendre le chinois. Tout le monde ? Mais j'ai ma question toute prête : "pour quoi faire?".
Ce n'est pas l'Angleterre qui fait que l'anglais semble omniprésent. Si les Etats-Unis n'existaient pas, l'anglais ne serait même pas présent dans les institutions européennes. Il n'y aurait que l'allemand et le français ou peut-être que le français (ce qui était le cas de fait au début de la CEE mais la situation a changé progressivement surtout dans les années 90). Le Royaume-Uni n'est plus un pays si important, moins que l'Allemagne et que la France. Par contre, celui qui a les plus grosses (excusez le langage : celui qui a le plus gros pouvoir militaro-économique), on le sait, il est encore de l'autre côté de l'Atlantique. Et comme il faut toujours caresser les puissants dans le sens du poil quand on n'a pas d'idées... Je fais un pronostic : bon, peut-être qu'au niveau institutionnel on est mal barré pour progresser parce qu'on a pas des politiques qui ont une grande conscience de l'importance d'une langue, mais par contre, je peux prédire que la place de l'anglais va cesser de s'étendre car le réajustement économique des Etats-Unis avec l'émergence d'autres puissances (Brésil et Chine notamment) qui vont vouloir démontrer leur puissance, fait que cette perception de l'omniprésence de l'anglais va s'estomper. Peut-être qu'on se remettra à parler français en Europe, et non pas anglais quand on se rendra compte que le seul pays anglophone qui est vraiment dans l'Europe est l'Irlande. (le Royaume-Uni ne veut pas de l'Euro tant qu'ils ne peuvent  en tirer avantage immédiatement) (petite note a posteriori : souvent dans les pays d'Europe du Nord, et on le voit avec la crise d'Avril / Mai 2010, on se pose la question de sortir de l'Euro à partir du moment où cela implique la solidarité car ces pays ne souhaitent pas forcément aider / donner de l'argent à des pays qui n'ont pas la même rigueur économique qu'eux. Ainsi pour l'Allemagne et la Hollande, on a pu voir la question se poser).

Je vous renvoie également vers cet article qui fait suite à une polémique autour de textes de Frédéric Martel, article intéressant qui nous apprend ou nous rappelle que la prédominance de l'anglais n'est pas le fruit d'une évolution inexorable mais de négociations politiques, de guerres économiques, etc...

http://www.francophonie-avenir.com/Index_CD_Frederic_Martel,_un_colonise_mental.htm

Tag(s) : #Réflexions sur le français
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